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Être grosse et faire du sport : le défi d’oublier le regard des AUTRES.
Crédit: Montage par Myriam Daigneault-Roy

Je me souviens de mes étés de petite fille. Armée de mes deux tresses et de mon jumper carreauté, j’organisais de super courses dans le parc en face de chez moi. J’écorchais mes bébés mains en grimpant dans les arbres. J’aimais bouger. Je n’étais pas une all-star olympienne, mais je m’entraînais en cirque, gymnastique et natation. J’aimais faire du sport et me foutais bien de ce que les gens pouvaient en penser!
 


Crédit : Kate T. Parker

J’avais seize ans lorsque j’ai eu ma première prescription d’antidépresseurs. Les chevaliers noirs de mon anxiété avaient trop envahi le château fort de mon crâne. Les petites pilules ont aidé mon mal-être. Par contre, mon métabolisme, lui, n’a pas du tout apprécié! Aussi, avec mes problèmes de coco, je n’avais plus envie de rien, le sport a un peu pris le bord. En l’espace d’un an, j’ai pris 70 livres.

Mon corps s’est transformé.

Puis un jour, c’est arrivé. Je me rappelle, un matin d’été, je courais en camisole et j’ai vu deux garçons jolis et stylés rire de moi en me pointant du doigt. Bouffée d’angoisse. À partir de ce moment, mon cerveau a enregistré que mon corps en mouvement était laid et honteux.

Je n’ai jamais pu arrêter les antidépresseurs. Je n’ai jamais aussi réussi à perdre le gras que j’ai accumulé sur mon corps avec la grisaille. J’ai appris à me trouver belle! Je sais aussi que je peux plaire et être désirable. Par contre, il y a un bémol sur ma partition. Pour m’aimer, je dois être à mon meilleur : beaux vêtements, belle peau, beau visage, belle prestance…
 


Crédit : This girl can

Maintenant, quand je m’entraîne, je scrute sans cesse le visage des gens, si leurs yeux-jugement-dernier regardent mon gras de bras. Pour éviter ces yeux qui m’effrayaient tant, l’été dernier, lorsque j’avais envie de jogger, je m’autorisais à le faire uniquement vers 1 h du matin. Lorsque le noir ne permettait pas aux rares passants de voir mon ventre rebondir au rythme de mes pas. Aussi, je crois que la petite voix mesquine et honteuse de ma tête m’empêche de faire du sport avec mon chum. C’est qu’il est pas mal plus fit que moi.  Ma tête me répète sans cesse que le gras qui bouge ce n’est pas beau en société.

Je sais que je me mène moi-même en bateau. Pourtant, j’ai l’impression qu’il y a dans l'espace média tellement de négativité dirigée envers les personnes en surpoids que j’ai de la difficulté à me raisonner.

Mais j’ai pris une décision. Je sais que ça ne sera pas easy breezy beautiful dans ma tête, mais je veux apprendre à m’assumer. Laisser mon corps curvy faire du sport. Avoir chaud, être rouge, voir mes poignées d’émotions bouger à la lumière du jour sans avoir peur de ce que les maudits autres pensent.
 


Crédit : Marc-André Roy
This girl can!

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