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Quand le corps change trop vite.

Auteur: Annie Nonyme
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Quand le corps change trop vite.
Crédit: Butler Trancy's Journal

Je suis une fille de 5 pieds 9 pouces et je ne connais pas exactement mon poids, ce qui ne m’empêche pas d’être insatisfaite de mon corps. Surtout de mon ventre.

Je suis loin d'être obèse. En fait, sauf quand je suis nue, ce n’est pas si pire. Je pourrais toujours faire de l’exercice et manger mieux pour améliorer mon apparence, mais aller au gym me fait vraiment chier.

Reste que parce que je ne suis pas « si grosse que ça », je n’ai pas le droit de me plaindre. Parce qu’il y a toujours quelqu’un pour me dire qu’elle est pire. Ça me rappelle un peu le documentaire de Léa Clermont-Dion : parce qu’elle est très belle, elle n’est pas « censée » se sentir concernée par son poids, par le regard des autres, par cette pression sociale de performance et d’image.

Quand j’étais jeune, j’étais un bâtonnet. J’habillais une taille 0 à 15 ans. Je voulais vraiment être mannequin. En casting, on m’a dit que je devais perdre 10 livres, alors que j’en pesais 110 pour 5 pieds 9! J’ai eu de la chance de ne pas tomber dans le cercle vicieux des troubles alimentaires. À l'extérieur des agences, je recevais beaucoup de compliments sur ma silhouette. Cependant, c'était toujours un peu des compliments tordus qui valorisaient la minceur ou la maigreur comme standard de beauté.

Quand je me bourrais la face de biscuits, ma mère me disait souvent que je devais faire attention pour garder ce ventre plat qui était beau en bikini. Je sais qu’elle ne voulait que mon bien et ma santé, mais quand je me suis mise à prendre du poids, elle me l’a reproché. Un gaspillage, selon elle.

Ma mère me comparait à elle, qui n’avait jamais eu un ventre plat comme le mien. Elle chérissait mon ventre plus que moi j'y tenais. À cause de ça, je m’en suis voulu de prendre du poids. Je regardais les photos de moi à 15 ans, quand je me claquais un sac de Cheetos entier sans que mon corps en souffre, et je m’en voulais d’aimer autant la malbouffe, d’aimer autant manger et d’avoir un gros appétit. Je m’en suis voulu de ne pas avoir fait attention avant de ne plus pouvoir rentrer dans mes jeans.

Pourtant, mon poids ne concerne que moi.

Bonjour puberté.
Crédit : Annie Nonyme

Mais je n’avais pas le droit de me plaindre.

Parce que les rares fois où je l’ai fait, on m’a dit combien on aimerait avoir ma taille. Que je me plaignais le ventre plein, parce que d’autres personnes ont beaucoup de mal à se sentir bien dans leur peau.

Loin de moi l’idée de faire des caprices. Je tente seulement d'expliquer quelque chose : quand quelqu’un est « pire » que toi, tu n’as pas le droit d’être insatisfaite de ton corps; même s’il n’est jamais assez mince à ton goût à toi, même si tu aimes trop manger, et que manger affecte moins ta silhouette que celle de ta voisine.

Peu de gens aiment assez leur corps pour arrêter de se comparer aux autres, mais c’est un cheminement essentiel que je dois faire pour arrêter de penser que d’être plus mince me rendra plus heureuse. Parce que même si je n’ai jamais été obèse, je n’ai pas le droit d’être insatisfaite. Parce que de plus en plus, ce que je mange me pèse sur le dos : je me sens coupable d’aimer manger.

C’est dur de s’accepter, même si je ne suis « pas si pire que ça ». Je devrais changer quelques habitudes de vie pour rester en santé, mais c'est tout. Avec le temps, je dois accepter que le corps de mes 15 ans ne revienne pas et que c’est correct comme ça. J’en ai 23 aujourd’hui, et soit je l’assume, soit je le change. Reste qu'en fin de compte, la santé, MA santé, est plus importante que l’image.

Avez-vous ressenti de la pression lorsque votre poids a changé entre l'adolescence et l'âge adulte?

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