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Le jour où j’ai réalisé que je n’allais plus vraiment bien.
Crédit: Pony

Je ne peux pas dire que je ne l'ai pas vu venir. Disons que je l'avais balayé dans un coin. Je tentais tant bien que mal de tenir en équilibre. De faire comme si tout allait bien. Comme si j'allais bien.
 
J'ai été éjectée du pilote automatique. Je me suis réveillée d'une vie où j'étais somnambule depuis un certain temps. Je me suis regardée dans le miroir et je n'ai vu qu'une pâle copie de moi-même. Était-ce possible de vivre juste à moitié?
 
J'ai dû me rendre à l'évidence, je ne pouvais plus continuer. Je devais tout mettre sur pause. Me recentrer. Prendre soin de moi. Reprendre graduellement mes activités, mais à un rythme terriblement plus lent qu'à l'habitude. Il y a même des jours où je n'accomplis absolument rien.
 
On m'a dit qu'une athlète qui s'entraîne sans répit augmente son risque de blessure et que moi, j'étais une athlète de la tête. J'ai dû abandonner la course pour reprendre mon souffle.
 
Tapie dans le fond de mon lit, je dors beaucoup. Pour rattraper toutes ces nuits d'insomnie, j'imagine.  J'espère souvent me réveiller soudainement dans une vie normale. Une vie où je vais bien, ou tout suit son cours normal, comme prévu. Pourtant, quand je me réveille, je suis terriblement fatiguée. Épuisée.
 
Moi, celle qui a toujours réussi. Moi, celle qui déborde d'ambition. Moi, celle qui défonce les portes. Me voilà maintenant blottie derrière l'une d'elles, à manquer de force, ne serait-ce que pour l'ouvrir.
 
J'aurais préféré ne pas prendre ce détour. J'aurais espéré avoir un beau parcours droit et sans embûche. Je me suis même surprise à penser qu'il serait plus facile de souffrir d'un mal physique; d'être dans un lit d'hôpital avec des solutés et des scans. Avoir un mal tangible au lieu d'invisible. Avoir un mal qui attire la sympathie plutôt que le jugement ou l'incompréhension. 


Crédit : Tallulah Fontaine
 

Me voilà maintenant improductive. En arrêt. Vulnérable et incertaine. Rongée par les sentiments d'échec et de honte, mais plus humaine que jamais.
 
Dans cette société de production, je me suis toujours valorisée par mes accomplissements. Ceux qu'on applaudit. Ceux qu'on peut observer, analyser, évaluer. Faire toujours plus, toujours mieux. En ce moment, je suis, c'est tout. Je vis, je réfléchis et j'essaye d'être une personne plus complète. J'interroge mon cœur, je tente de comprendre mes émotions pour accepter mes failles et laisser la place à celle que je suis réellement.
 
Je suis, ici et maintenant, et c'est amplement.
 
Je ne sais pas si le plus difficile est passé ou s'il est à venir. Tout ce que je sais, c'est que ça va aller mieux, car je me suis donné le droit de ne pas bien aller. J'ai décidé d'écouter la petite voix que j'essayais de taire. J'ai décidé de remettre les choses en perspective. De m'arrêter pour mieux repartir et de tout faire pour m'offrir une vie, une vraie, qui me comblera. Lorsque je serai rendue à la ligne d'arrivée, je veux pouvoir regarder cette vie et dire que je l'ai vécue pleinement. Je veux pouvoir me dire qu'elle n'aura pas été parfaite, mais qu'elle aura été satisfaisante, gratifiante et heureuse.

Et surtout, que j'aurai vécu et non survécu.

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