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Les multiples visages de la discrimination en entrevue
Crédit: Annie Nonyme

J’ai officiellement terminé mes études supérieures en avril 2015. Depuis, j’ai passé plusieurs entrevues d’embauche. Je me suis même inscrite à des ateliers sur la recherche d’emploi pour améliorer ma performance en entretien. J’estime que je communique mieux maintenant, quoique ce soit presque toujours une situation stressante.

Je comprends que je n’ai pas choisi des « domaines faciles », c’est-à-dire que j’ai étudié en communication, en gestion culturelle et en journalisme. Au-delà de cette réalité « difficile » de domaines où il y a plus de diplômés que de postes disponibles, j’ai remarqué certaines tendances inquiétantes d’une entrevue à l’autre.

Par exemple, les questions déplacées des recruteurs, telles que : « Tu viens d’où ? » J’ai trouvé ça assez bizarre que l’employeur en question ait un air perplexe lorsque je lui ai dit que j’étais originaire de la Rive-Sud de Montréal, comme si je venais d’une contrée éloignée. « T'as quel âge ? » Ce n’est pas que moi qui considère ça de mauvais goût de demander l’âge à quelqu’un, c’est illégal de le faire en contexte d’entrevue. « Quel était ton salaire à ton dernier poste ? » Cette question m’a été posée en entrevue téléphonique. Probablement que la recruteuse déterminait l’expérience du candidat selon son salaire antérieur. Après coup, j’ai trouvé ça plus que déplacé.

Bien que 98 % du temps j’envoie mon C.V. en français, je suis souvent convoquée en entrevue lorsque des employeurs cherchent une personne anglophone parce que j’ai un prénom anglais et un nom canadien qui paraît plus anglais. Que dire de leur déception après l’étonnement lorsqu’ils s’aperçoivent que je suis francophone ?

Par ailleurs, un collègue de travail a déjà fait la gaffe de dire devant moi que j’avais un « nom bizarre » en oubliant momentanément mon nom. Ça m’est arrivé plus d’une fois que des collègues me disent qu’ils détestent « les Anglais » sans penser que ça représente la moitié de ma famille élargie. Je suis habituée à ce que les gens ne prononcent pas mon prénom comme il faut, mais de là à ce que mon nom devienne un sujet de conversation récurrent, c’est plus qu’agaçant. Je ne comprends pas pourquoi les gens réagissent ainsi en considération du nombre élevé de Québécois francophones qui ont des noms anglais et vice versa.

Dans le cercle de mon entourage, je parle seulement par observation objective, la plupart des personnes qui ont eu de la difficulté à se trouver un emploi après la remise des diplômes étaient des femmes qui faisaient partie de minorités visibles. Je n’ai pas tellement de difficulté à m’imaginer ce que les nouveaux arrivants, les enfants d’immigrants ou tout simplement les gens avec des noms qui ne sonnent pas traditionnellement franco-québécois peuvent ressentir comme frustration en sortant de l’école.

Je ne regrette pas mes choix de champs d’études ni d’avoir fait des études au deuxième cycle. J’ai étudié dans les domaines qui me passionnaient, non par souci pour la rémunération, ni non plus pour la reconnaissance sociale. Je regrette surtout que ce genre de situation persiste encore de nos jours.

Il me semble qu’un Québécois peut prendre différents visages et noms en 2016, tout comme c’était le cas en 1996. Un Québécois est une personne qui habite au Québec, c'est tout. Douter de l’identité de quelqu’un en raison de son nom ou de quoi que ce soit d’autre, c’est de la discrimination pure et simple.
 
Avez-vous déjà vécu une situation semblable?

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