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Tant que ça continue, on en parlera
Crédit: Eugenio Marongiu/Shutterstock
Non, Monsieur Boisvert, pour « vraiment combattre les agressions », il ne faut pas passer uniquement par notre système de justice, très mal adapté et peu efficace, lorsque vient le temps de traiter des questions d’agressions sexuelles.

N’en déplaise à ceux dont l’évocation même du terme les fait grimper aux rideaux et s’insurger contre les « feminazis », la culture du viol n’est pas un mythe, elle est bel et bien présente dans notre société. Ce à quoi s’expose la jeune Alice Paquet en dénonçant publiquement son agresseur le démontre bien. Ça dérange les gens qu’on parle de viol et qu’en plus, on affirme que même nos élus, ces personnages influents de notre société, puissent agir de la sorte. On se ferme les yeux, on refuse de le croire, on remet en question la parole des victimes et prend la défense des agresseurs. Combien de gens l’insultent, la menacent, la traitent de menteuse, de pute, de tout ce que vous voulez sur les médias sociaux? Il n’y a qu’à lire certains commentaires.
 
Diminuer l’impact d’un viol, remettre toujours en question les paroles des victimes, les faire sentir coupable de leurs agressions, prendre la défense de l’agresseur en disant qu’elle aurait dû être plus explicite dans son refus, ce sont tous des exemples d’une culture qui banalise les agressions faites envers les femmes. Le fait que les gens réagissent aussi fortement dans les médias lorsque des femmes décident de dénoncer leurs agresseurs prouve aussi que nous avons des questions à nous poser en tant que société.

Je suis d’accord que nous devons faire condamner les agresseurs via le système judiciaire, mais dans un système ancré dans une culture qui le rend très peu efficace pour ce genre de délit, il est peut-être temps de revoir la façon dont sont traitées ces causes, surtout lorsque l’agresseur est un homme influent, avec du pouvoir et de l’argent.

Pourquoi ne pas tenter de « vraiment combattre les agressions » en engageant une grosse réflexion de société sur nos perceptions, nos habitudes et le rapport des hommes aux femmes, afin d’éviter que les hommes ne violent les femmes, plutôt que d’attendre qu’ils les violent et tenter tant bien que mal de les faire condamner par un système de justice complaisant une fois le mal fait?
 
Il y a un vieux dicton qui dit : mieux vaut prévenir que guérir. Pourquoi ne pas réfléchir à la façon dont nous élevons nos garçons, à la façon dont nous leur expliquons le respect de la femme et, surtout, à celle dont nous leur parlons du concept de consentement, qui semble être extrêmement difficile à saisir pour beaucoup d’hommes? Sans oui, c’est non. Si la femme n’est pas en mesure de démontrer son consentement de façon claire parce qu’elle dort, qu’elle est trop saoule ou droguée, c’est non. Si tu as un doute, c’est non. Même s’il y a un début de contact, par exemple des baisers, ça ne veut pas dire oui automatiquement pour une relation sexuelle complète et, en tout temps, la femme a le droit de retirer son consentement et de demander de mettre fin aux contacts.

Que ce soit une fille rencontrée le soir même, ta blonde ou ta femme depuis 15 ans, ça n’y change rien. Sans oui, c’est non. Point. Le fait d’avoir un lien affectif avec la femme ne donne en aucun cas le droit à l’homme de décider pour elle ou de tenir pour acquis un consentement à une relation sexuelle. Chaque relation, le consentement doit être renouvelé.
 
Si on véhicule ces valeurs sans compromis en tant que société, plutôt que de nier l’existence d’une culture qui remet en question la parole des victimes, là on travaille à « vraiment combattre » et prévenir les agressions.

J’ai hâte au jour où les femmes comme Alice Paquet n’auront plus à sortir dans les médias pour lancer un cri du cœur, parce qu’on leur aura redonné confiance envers le système de justice. Mais, pour l’instant, leur parole est l'un des seuls outils dont elles disposent pour nous faire réfléchir sur la violence faite aux femmes dans notre société. Ne perdons pas cette occasion de réfléchir pour amorcer un nouveau virage culturel et social et, ultimement, faire diminuer cette violence trop souvent banalisée AVANT qu'elle ne se produise.

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