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Lettre ouverte à toi, victime de ses poings à lui
Crédit: EAK MOTO/Shutterstock

Les mots me manquent pour te dire. Tant de douceur, tant de force, tant de chaleur.
Pour casser la froideur, masquer les plaies, continuer à respirer. Pour oublier cette violence crue, comptée, saccadée.
 
On dirait que c’est impossible. On l’assimile, j’en prends une partie, je t’en vole un morceau pour t’alléger. Je ne peux accepter que ce soit toi qui as tout reçu, seule, dans le blanc sali d’un appartement qui n’était pas le tien. De ses poings à lui. De façon délibérée, derrière un regard vide.
 
C’est à crier à s'en défoncer les poumons de l’intérieur. Parce que même le son puissant d’une voix ne pourra exprimer cette douleur qui transperce. C’est à n’y rien comprendre. De savoir que tant de violence peut être enfermée dans un corps de moins de six pieds.
 
Les mots me manquent pour te dire. Mais les signes, eux, ne mentent pas. Tu m’excuseras de ne pas les avoir vus avant que ça devienne physique. La tourmente, la boussole qui peine à tenir le nord, le déséquilibre. Mais les policiers, eux, les ont vus. Sans même hésiter, ils t’ont offert un premier calme.
 
Les mots me manquent pour te dire. J’ai peur. Pour toi, pour les autres. Pour celles qui ne parlent pas. Pour celles qui retournent trouver de l’amour brisé et des parcelles de leur âme cassée. Pour ce qui s’en vient. Les explications à donner, les témoignages formels à faire, l’histoire à raconter encore et encore. Sans oublier les préjugés faciles, les jugements, les regards qui rappellent constamment la violence, la douleur, l’inimaginable.
 
Les mots me manquent pour te dire. Toi qui m’inspires, qui me donnes le goût de croire qu’on peut faire mieux, que l’amour peut primer, que la magie nous entoure. Qu'on peut transformer un tas de gravier sale en une fleur bourgeonnante qui éclate au soleil. Tu me donnes une énergie nouvelle, la force de croire en nos rêves les plus fous.
 
Les mots me manquent pour te dire. J’ai tellement de fierté de te savoir la tête haute. De pouvoir être à tes côtés alors qu’on ira contre Goliath. Parce que j’y serai. On y sera. Le système portera ta voix, ton histoire, ton vécu avec justice. Mais pas juste la tienne. Celles de toutes ces femmes qui ont souffert et qui continuent de souffrir en silence, gelées par la peur que le pire puisse arriver. Te connaissant, tu les porteras avec toi, bien ancrée sur ton cœur qui est grand comme l’espace et qui a tant à donner.
 
Et pour ça, je te dis merci. On sera là les uns pour les autres, pour nous-mêmes et pour un monde meilleur. C’est toi-même qui l’as dit.

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