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Despacito : une histoire de racisme décomplexé
Crédit: Universal Music/YouTube

Je n’ai jamais vu un hit qui déchaîne autant les passions que la chanson Despacito, de Luis Fonsi et Daddy Yankee. Cela faisait déjà un moment que je réalisais que certains biais racistes affectaient la manière dont cette chanson était reçue par le public, notamment en raison des nombreux articles et statuts Facebook insistant sur le fait que la chanson est très « chaude », très sexuelle, voire vulgaire.

Pourtant, il me semble qu’elle n’est pas plus explicite que la majorité des hits que l’on peut entendre à la radio ; je trouve même qu’elle exprime un beau respect du consentement, par exemple en demandant à la femme de la chanson d’exprimer ses désirs et en montrant un souci de faire plaisir à sa partenaire. Selon moi, le stéréotype selon lequel les personnes latinx seraient plus libidineuses par nature a fort à voir dans cette histoire.

Et la lecture de cet article de Josée Blanchette m’a montré que mon instinct était juste : on peut y retrouver stéréotype après stéréotype néfaste à propos des latinos. Parlant de Luis Fonsi comme d’un « latin lover » (ark, sérieusement?), elle affirme qu’on « sait très bien où il veut en venir » avec ses belles paroles et le dépeint comme un être bestial, assoiffé de sexe. Elle parle également de la mélodie comme d’un rythme « tribal » et affirme que les mouvements de danse du reggaeton ont pour but d’imiter « la copulation », véhiculant par là une image très rétrograde des personnes latinx et de leur culture, qu'elle décrit aussi comme kitsch. En plus de son racisme flagrant, Josée s’en donne à cœur joie dans le slut shaming : elle décrit la femme apparaissant dans le vidéoclip (Zuleyka Rivera) comme une « putain », en petite tenue, elle décrit son « sillon mammaire » et les ondulations de son corps avec un mépris palpable.

Si Josée voulait faire la comique, c’est raté. Dans le contexte actuel du Québec où les groupes racistes d’extrême droite comme la Meute deviennent de plus en plus visibles, ce genre de propos empreints de préjugés envers les personnes issues de différentes cultures est simplement inacceptable et maintient un climat de mépris nourrissant la haine de l’autre. On peut certes essayer de minimiser la situation en disant qu’après tout, ce n’est qu’un innocent commentaire sur un hit pop bien banal, mais je pense qu’il faut prendre ce genre de propos au sérieux. Ils ne sont qu’un des nombreux symptômes d’un mal profondément enraciné au Québec, celui du racisme. Et il est de notre devoir d’affirmer fermement que ce genre de propos est simplement inacceptable, qu’on les dise « en blague » ou non.

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