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Et si les femmes avaient le droit de jouir en paix, elles aussi?
Crédit: Marvin Meyer/Unsplash

C’est étrange qu’encore aujourd’hui le plaisir sexuel des femmes soit si tabou. On dirait qu’on a enfin admis que les femmes ont une vie sexuelle au lieu de vouloir le cacher à tout prix, mais, malgré cela, le plaisir qu’elles peuvent retirer dans la sexualité semble mis de côté. Pourtant, celui des hommes est donc crucial.

Crédit : Giphy
 

Effectivement, le désir sexuel des hommes est remâché un peu partout, que ce soit dans les conversations d’ami.e.s autour d’une bière, dans les films ou les émissions de télévision, et en humour aussi. Ça m’étonne toujours quand je vais voir un spectacle d’humour à quel point les sujets tournent autour de la sexualité masculine : fellation, érection, éjaculation, masturbation, nombre de partenaires, etc. Pourtant, je vois rarement des humoristes discuter de sujets sexuels ayant rapport avec le plaisir des femmes – il faut dire que les femmes en humour sont trop peu nombreuses, mais quand même!
 
Dans les films ou les émissions, la femme se plie souvent aux désirs de l’homme en termes de sensualité et de sexualité pour que celui-ci actualise son potentiel de mâle viril. Elle gagne ainsi son cœur, lui offrant sa chair sur un beau plateau de fruits (ou d’argent, c’est selon). Elle doit se rendre désirable aux yeux de l’homme. On nous fait alors croire que tout ce que l’homme veut, c’est du sexe et tout ce que la femme recherche, c’est l’amour. C’est de la fiction, je sais, mais c’est rare qu’on puisse voir une femme épanouie et émancipée sexuellement sans qu’une certaine trame de fond de « shaming » fasse son apparition à un moment ou à un autre…
 
Il y a tellement plein d’images ou de modèles qu’on reçoit en tant que femmes, depuis vraiment trop longtemps, qui nous font croire que le plaisir sexuel n’est pas notre département. Il me semble que ce serait bien que l’éducation sexuelle donnée aux adolescentes ne serve pas seulement à mettre en garde contre les dangers d’ITSS, de grossesse précoce* ou de la dangerosité du désir incontrôlable des hommes, qui n’ont d’ailleurs que ça en tête. C’est certain que c’est important de parler d’ITSS et de contraception, mais quand est-ce qu’on va leur parler d’orgasmes, de clitoris ou de cunnilingus?
*À noter que ce ne sont pas toutes les femmes qui ont un appareil reproducteur dit féminin.

Dans mes discussions d’ami.e.s, je suis pas mal certaine qu’un homme pourrait aisément parler de ses ébats ou de ses séances de masturbation. C’est normal, c’est « homme », « he has needs ». Surprise, surprise : les femmes aussi, et ils sont importants. Nous ne servons pas seulement à traîner des condoms dans notre sacoche, à s’occuper de prendre notre pilule chaque jour, à se faire tester chez le gynécologue une fois par année, à enfanter, à faire de bonnes fellations et à se faire appâter comme des proies avec des verres de gin-tonic gratuits le mercredi. Je ne m’étendrai pas ici sur la charge mentale des femmes quant à la santé sexuelle… Ni sur le double standard pour le nombre de partenaires sexuels adéquats à avoir en tant que femmes, han! 
 


Crédit : Giphy

 
L’éducation sexuelle que j’ai reçue ou les discussions que j’ai eues sur la question quand j’étais plus jeune ne m’ont jamais fait croire que j’avais le droit d’avoir le même désir sexuel ou les mêmes fantasmes que mes amis hommes. Je pense que je me suis masturbée pour la première fois à l’âge de 19 ou 20 ans. Je suis pas mal certaine que mes petits amis garçons du secondaire faisaient ça à 15 ans (ou avant) et en parlaient à TOUT LE MONDE. J’ai appris le mot « pipe » à 12 ans. Je ne peux pas en dire autant du mot cunnilingus, je vous en passe un papier! Depuis pas si longtemps, je suis capable de communiquer mes besoins sexuels à mes partenaires. Pourtant, ma première relation sexuelle date de plus de 10 ans.
 
Je ne pense pas être la seule dans cette situation, car j’ai beaucoup d’amies femmes qui m’ont confié avoir été longtemps insatisfaites ou qui le sont encore… Par exemple, le nombre de femmes que je connais qui ne jouissent pas ou jouissent très rarement lors d’une relation sexuelle est vraiment élevé comparativement au nombre d’hommes que je connais. Ce n’est pas un concours de performance et certaines personnes sont asexuel.le.s et c’est bien correct. Sauf que je trouve que c’est une aberration incroyable quand même que les femmes découvrent le plaisir sexuel aussi tardivement comparativement aux hommes.
 
Est-ce qu’on pourrait jouir en paix nous autres aussi S.V.P.?! Merci.

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