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Pourquoi on n’a pas besoin de voir le show de Guy Nantel pour le critiquer

Salut, je m’appelle Josiane Stratis et je n’ai pas vu le show de Guy Nantel. En fait, on me payerait pour aller le voir que je dirais non. Je n'ai pas envie de le voir, pas envie de l’entendre et surtout pas envie de me mettre en danger pour y assister. J’ai un site de jeunes femmes modernes (merci Simon Jodoin pour la quote) et chaque semaine, je dois faire de la modération de commentaires de gens qui nous traitent de folles, nous demandent de nous suicider pour nos idées. Ça, pis ben des affaires.

Savez-vous pourquoi? Ou Ti-Guy, le sais-tu pourquoi qu’on se fait dire des affaires de même? Parce qu’on s’affiche comme féministes. Parce qu’on parle d’enjeux sociaux qui dérangent. Parce qu’on défend les personnes qui sont oppressées (parce que pas grand monde le fait).

Tu veux jouer à l’épais et dire que c’est du deuxième degré de rire des Grecs en les appelants « souvlakis » (le genre de joke que j’entendais au primaire, mais ok) et de rire de tout ce qui s’est passé suite à la dénonciation d’Alice Paquet? C’est drôle ça, le viol. Ce mois-ci, quand on a appris qu’une gang de personnes perdait leur job parce qu’ils avaient fait des jokes comme montrer leur pénis, on va dire, c’était drôle, ça. Rozon et Salvail doivent vraiment avoir trouvé ça drôle.

C’est cool, mais c’est toujours les mêmes personnes qui peuvent dire qu’elles sont « deuxième degré ». Si une fille dit sur Facebook que « all men are trash », elle va se faire bloquer son compte. Si elle le dit publiquement ou si elle prend la parole pour dire que quelque chose est sexiste, elle va se faire traiter elle-même de sexiste par une gang d’hommes blancs cis qui vont brailler toutes les larmes de leur corps, clamant qu’ils sont victimes de la misandrie des femmes.

Tu dis des propos misogynes, tu ris du viol d’une femme, tu ris du consentement, pis après tu nous demandes d’être assez intelligent.e.s pour comprendre. Je sais pas, miroir man, tu devrais peut-être t’assurer que tes propos sont assez intelligents pour être compris par tes auditeurs, qui btw ne volent pas super haut au niveau de la compréhension à en voir ta page Facebook.

Chaque jour de notre vie, on se fait ramasser. CHA-QUE JOUR. Il n'y a pas une seule journée où on ne se fait pas dire des affaires misogynes, où notre salaire est égal, où on n'a pas la charge mentale de la maisonnée, où on n'a pas peur de se faire toucher dans le métro ou dans un bar…

Fait que non, on n'a pas besoin de voir ton show pour critiquer ton propos, parce qu’on l’entend tous les jours déjà. Quand on dit quelque chose, que ça fait partie d’un processus d’écriture pis que c’est mis dans un spectacle, faut avoir l’intelligence de savoir que ça se peut que ça fasse réagir des gens pis la décence de respecter que ça peut choquer.

Je vous laisse sur les douces paroles de ma collègue Myriam Daigneault :

Pour rire de la culture du viol, il faut n'avoir jamais vécu de harcèlement. Le sentiment de peur et de dégoût que ça provoque donne envie de crier. Pas de rire. 

Capitalisme sale de l'humour. La joke la plus provocante. Celle qui va donner le plus de clics, le plus de rires gras des mononcles. Peu importe si ce qui est dit est vrai. Peu importe si ça blesse des gens qui ont vécu des choses horribles. Le rire à tout prix. 

Se dire contre la culture du viol. Rire d'une victime, invalider son expérience. Hypocrisie. Jouer le good guy quand ça sert, être un asshole tout le temps. 

Ça fait très homme blanc privilégié de se sentir opprimé par les méchantes féministes. Presque aucune oppression, faut s'en inventer.

On pourrait croire qu'après l'affaire Rozon, les humoristes auraient appris à fermer leurs gueules pis écouter. Pas Guy Nantel. 

Laissez-lui sa belle liberté d'expression pour basher gratuitement les victimes de viol. #Not 

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