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À l’étudiante épuisée, sur le bord de craquer
Crédit: chalis007/Unsplash

L'autre jour, alors que j'arpentais les couloirs de l'université, j'ai croisé une étudiante cernée jusqu'au menton. Sa démarche était rapide et saccadée, mais visiblement, elle avait besoin d'une pause. Si elle lit ces mots, c'est qu'elle a finalement décidé de prendre quelques minutes de repos entre ses travaux scolaires.

Son cerveau surchauffe et si cette course effrénée continue ainsi, l'épuisement aura certainement sa peau. Ses yeux empreints de fatigue filtrent lentement ces phrases qui, à la vitesse dont elle les décode, sont exemptes de sens. 

Puis elle s'en veut : pourquoi avoir pris une pause tandis qu'elle sait très bien qu'elle a tout un tas de choses à faire? Et pourquoi donc être exténuée de la sorte alors que l'année scolaire vient tout juste de commencer? Pourquoi? 

Elle se tape sur la tête. Encore, toujours. 

Elle s'en veut amèrement de ne pas être à la hauteur des attentes qu'elle s'est fixées, de cette perfection à laquelle elle aspire. Son niveau de frustration et d'anxiété monte à vue d'oeil : elle se pensait meilleure que cela. Elle croyait être capable de tout : faire partie de tous les clubs qui l'intéressent, avoir les meilleurs résultats scolaires, se faire remarquer par ses enseignant.e.s, être appréciée par ses condisciples et être disponible pour ses ami.e.s, avoir une routine de sommeil et d'alimentation irréprochable. Mais la voilà, grugée par le stress et l'insomnie.

Son corps est convaincu qu'un tracteur lui a roulé dessus et ouvrir ses cahiers exige un effort physique et mental surréel. Bref, elle est prisonnière d'une colère infâme, d'un stress inhumain et d'une incompréhension qu'elle juge inadmissibles, car contrairement à son habitude, elle n'arrive pas à donner un sens à la situation, elle n'a pas la réponse à ce mal-être qui la dépouille de toute son énergie. 

Or, moi, je dis que tout ça, c'est normal, que tout cet épuisement n'est en aucun cas de sa faute et qu'elle n'est pas la seule personne à se sentir de la sorte. Et si, au lieu de s'en vouloir ainsi, je lui proposais de faire preuve d'un peu d'autocompassion? Si je lui disais de se donner le droit d'aller se chercher sa collation préférée et de s'asseoir dans son salon le temps de son film préféré?

Qu'adviendrait-il de si terrible, si ce n'est de faire un gros doigt d'honneur à ce quotidien pressé qui nous martèle les oreilles sans trêve?

Parce que moi, je dis que c'est amplement correct d'être exténué.e quand l'école recommence. En effet, on attend de nous à non seulement nous réhabituer à un rythme de vie fort exigeant en plus de se conformer aux attentes de nos professeur.e.s, mais aussi à demeurer présentables et actif.ve.s socialement. Bref, on nous demande le quasi-impossible. Nous sommes des humain.e.s et il est fort probable, voire normal, de se sentir à bout de souffle, d'avoir besoin de temps d'arrêt. Nous méritons de nous accorder ces pauses et de nous faire du bien, de prendre soin de notre santé mentale et physique qui, dans ce tourbillon sans fin, peut facilement être oubliée. 

Cette fille, c’est peut-être vous, votre soeur, votre amie – ou est-ce peut-être un frère, un voisin. En tout cas, dites à cette fille que c'est correct d'avoir pris une pause, même que je lui lève mon chapeau!

Prendre soin de soi n'est pas une perte de temps.  

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