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Quand allons-nous arrêter de « découvrir » les femmes?
Crédit: Virginie Lessard Brière

Récemment, la maison d'édition La Peuplade publiait un petit roman du nom de Fair-Play, écrit par Tove Jansson. 

L’écrivaine finlandaise est née en 1914 à Helsinki où elle est décédée en 2001, à l’âge de 86 ans. Son nom vous dit peut-être quelque chose si vous connaissez les moumines, ces petites créatures blanches et joufflues dont les histoires ont connu un succès mondial. Ou alors, est-ce peut-être Le livre d’un été, le roman pour adulte le plus populaire de Jansson, qui vous met la puce à l’oreille.

Quoi qu’il en soit, si, comme moi, vous n’avez jamais entendu parler de Jansson, vous n’êtes pas seul.e.s. 

Avant que Marie-Louise Arsenault, Claudia Larochelle et Daphné B en discutent à Plus on est de fou, plus on lit, je n’avais moi aussi qu’une vague idée de qui était cette artiste. 

À les entendre comparer la découverte de Jansson à la découverte de Sylvia Plath, de Virginia Woolf ou de Simone de Beauvoir, j’ai évidemment été intriguée. Rapidement, je me suis procuré Fair-Play que j’ai lu avec beaucoup de plaisir. 

Dans ce livre, nous suivons les journées de Mari et de Jonna, deux femmes âgées qui dessinent, peignent, sculptent, écrivent et discutent. Nous sommes témoins de leur proximité et de la tendresse qui les habitent depuis des années ; nous écoutons leurs conversations parfois drôles, parfois graves, avec l’oreille attentive de ceux qui aiment déceler la philosophie dans les causeries du quotidien. 

Lorsque j’ai terminé ma lecture, je me rappelle m’être dit que j’étais heureuse d’avoir « découvert » cette écrivaine. Puis, s’est installée une autre idée, plus dérangeante : je me suis demandé, quand allons-nous arrêter de « découvrir » les femmes (écrivaines ou autres)? Quand apprendrons-nous leur nom à l’école, au lieu de tomber sur leurs œuvres par hasard?

Ce qui est triste, c'est que le cas de Jansson est loin d’être isolé. Historiquement, les femmes se sont fait écarter des institutions par divers moyens : elles sont rarement mentionnées dans les listes de prix, elles en gagnent donc encore plus rarement ou alors on les accuse d’écrire de la « littérature féminine » si elles osent parler de leurs réalités par un point de vue subjectif (ce que tous les écrivains de la terre font…). Moins de reconnaissance par les institutions fait en sorte qu’elles sont moins lues, moins étudiées, et donc, moins enseignées. Ce cycle se perpétue, et elles deviennent inconnues, ou presque, en attendant que des contemporain.e.s les redécouvrent. 

Je ne sais pas pour vous, mais j’ai hâte d’arrêter de les chercher. 

Si c'est aussi votre cas, écrivez en commentaire les noms d’écrivaines que vous avez « découvertes » et que vous avez aimées. Ça pourra aider quelques-unes d’entre nous à les connaître!

(Pssst : si le sujet vous intéresse, je vous conseille de lire l’excellent ouvrage de Nick Turner, Post War British Women Novelists and the Canon. Il explique très bien les mécaniques de la machine à légitimation dont les femmes sont très souvent exclues.)

 

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