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Justification d’un utérus vide
Crédit: Terricks Noah/Pexels

– Je peux t’offrir quelque chose à boire? Vin, cocktail, bière…?
– Non merci, je vais attendre un peu.
 
Trop tard. Je fais face à des petits yeux qui s’illuminent devant l’idée que mon utérus vide soit habité. 
 
Parce qu’à 26 ans, je suis à court de raisons valables et vérifiables. Je suis mariée. J’ai remis mon mémoire. Acheté un chez-moi. Trouvé un bon job. Je devrais être rendue là. 
 
Oui, mais non. 
 
J’ai pas à me justifier, je le sais. J’ai passé 20 ans sur les bancs d’école. Je me suis privée de trop de petits bonheurs durant les 5 dernières, faute de temps, d’argent et en me sentant vraiment mal par en-dedans. J’ai culpabilisé pendant deux ans, dès que je faisais autre chose que rédiger, y compris vivre et dormir. Mon cerveau est en réhabilitation. Il réapprend à m’aimer malgré tout ce que je lui ai fait. Il réinstaure les droits d’accès aux choses que j’aimais faire et que j’ai oubliées, au fil des années. Pis pendant que ça arrive, je veux pas me stresser avec l’impression de devoir me dédoubler alors que je ne me sens pas entière moi-même. 
 
Ce n’est pas normal que la pression commence avant même qu’on enclenche le processus. Que je me demande déjà comment je vais habilement cacher mon abstinence d’alcool dans mes trop nombreuses soirées avec le monde que j’aime. Que je craigne devoir effacer les soupçons d’une tentative ratée à grandes gorgées de gin tonic en me faisant dire « on était vraiment sûrs que vous alliez nous annoncer une bonne nouvelle… ». 
 
Parce que du haut de mes 26 ans, prendre un verre est un statement. Un indicateur de l’emptiness de mon bas-ventre. Une manière de couper court une discussion qui regarde personne d’autre que mon amoureux et moi. 
 
– Je peux t’offrir quelque chose à boire? Vin, cocktail, bière…?
– Je vais te prendre une coupe de vin, merci.
 
Note : Je ne vise personne en particulier avec ce texte, alors no worries si tu m’as demandé au cours des derniers mois si je prévoyais avoir un bébé bientôt. Tu fais juste partie de la majorité des gens que je côtoie. C’est pas la fin du monde : on ira prendre un verre et parler d’autre chose! 

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