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Mon hospitalisation en psychiatrie m’a sauvé la vie
Crédit: Clara B. Turcotte

Souvent, avant de dormir, il y a cette image qui pop-up dans l’écran du film de ma tête. Il y a moi étendue sur un lit dans un trashy dortoir. Tout est blanc, tout est terne et ça crie fort. Impossible d’être triste en paix. Cette nuit-là, je lançais mon ultime appel à l’aide. Je voulais empêcher ma tête de faire mourir mon corps. J’avais déjà failli me tuer sans le dire à personne. Je ne voulais pas de ça. Je cherchais de l’aide, désespérément. Je criais sur tous les toits des CLSC que je n’allais pas bien. Personne ne m’entendait. Trop de dossiers.

La santé mentale n’est malheureusement pas une priorité.

Ce soir-là, je suis partie du bar de l’UQAM complètement déphasée. Accompagnée de mon plus fidèle acolyte de mes combats de tête (allô papa), j’y suis allée. L’hôpital psychiatrique. C’est con, mais pour moi, un hôpital psychiatrique, c’était big. J’avais l’impression d’avouer ma folie. Avouer que je n’étais plus rien, une paria de la société. J’y suis arrivée, et j’ai compris. Je venais d’accepter que j’étais à mon plus bas.

En arrivant, ils m’ont tout pris. Téléphone, écouteurs, collation, name it. Je n’ai pu garder qu’un livre. Je n’avais plus l’impression d’être humaine. J’étais une forme. Une boule dans la salle d’attente. Une boule qui ne voit plus le temps passer, TVA nouvelle en background. On m’a appelée. J’ai expliqué, encore. On m’a demandé si j’étais un danger pour moi.

Je savais que oui.

Je devais rester pour la nuit.

J’ai passé les portes. Celles où tous les naufragés des bobos de têtes dérivent. J’ai enfilé la jaquette d’hôpital. Indémodable bleu-bébé-vomis. J’étais une boule fantôme. J’ai rencontré mes colocs de chambre pour la nuit ou plus, si affinités. Premier visage rassurant. Une jeune jedi de la santé mentale. Une amie. Pour la première fois, je ne me sentais plus complètement seule de ma gang. Ça m’a fait du bien. On a dormi. Un peu.

Le lendemain matin, j’ai eu la visite de mon armée de Dumbledore personnelle. On avait entendu mon appel à l’aide. Ami(e)s et parents étaient là. À partir de ce moment, j’ai été prise en charge. J’ai eu des rendez-vous en externe et j’ai pu quitter. Je ne dis pas que tout a été facile. Le traitement de ma dépression a même été mon épreuve la plus difficile. Mon Hunger Game personnel. Par contre, j’ai compris que je n’étais plus toute seule. J’ai aussi compris que j’étais malade, j’étais en dépression. J’ai décidé que je devais crier, plus fort, pour que plus personne n’ignore la maladie mentale.

Je ne tire pas que du positif de mon expérience d’hospitalisation en psychiatrie. Notre système de santé mentale néolibéral en est pour quelque chose. Cependant, ma visite aura été ma façon de me garder la tête hors de l’eau. Un genre d’épiphanie. Pas mourir.

J’ai aussi appris que les aides psychiatriques ne sont pas un démon laid et épeurant. Elles aident à guérir. Hôpital normal.

Si tout chavire autour de vous, il y a toujours des solutions. Une maladie mentale n’est pas une faiblesse. Vous êtes fortes et forts.

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