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Quand la nutrition devient un cauchemar
Crédit: Charles Etoroma/Unsplash

Ça faisait plusieurs mois que je me questionnais quant à mon rapport à la nourriture. Je savais qu'il y avait un problème, et je me doutais bien que ma relation avec celle-ci était malsaine, mais je ne pensais pas sérieusement que ce que je pouvais avoir, c’était un trouble alimentaire tel que l'anorexie ou la boulimie. Alors je me disais qu’au fond, ça ne devait pas être si grave.

Durant les vacances des Fêtes, j’ai comme eu une révélation. On mange généralement de façon plus copieuse durant cette période de l’année (et c’est ben correct!), mais je me suis surprise à m’observer durant cette période, et j’ai un peu reconnu en moi un sentiment d’exaltation, de bonheur un peu trop intense, de réconfort ultime lorsque je mangeais. Un sentiment beaucoup trop fort que je ne semblais pas reconnaître chez les autres, qui étaient capable d’une chose à laquelle je faillais constamment : le contrôle.

Je me suis rappelé les nombreuses fois durant ma dernière session où, en revenant chez moi à 14 h, je mangeais une quantité surprenante de nourriture (et pas genre des brocolis). Je ne reconnaissais même plus les signaux de faim, ils disparaissaient sous tout ce que j’ingérais en un temps record. Ça faisait du bien, sur le coup. Pendant quelques instants, j’oubliais tout ce qui n’allait pas. Mais une fois que c’était fini, sous les miettes, je me détestais amèrement.

Un soir de janvier, bien dans mon lit, alors que je traversais une de ces périodes de blues nocturnes durant lesquelles je me sens comme de la marde, j’ai décidé de faire des recherches. C’en était assez, je voulais arrêter de manger autant. Depuis quelques jours, l’idée d’un trouble alimentaire m'était revenue en tête. Mais c’était impossible, m’étais-je dit, je savais que je n’étais ni anorexique ni boulimique.

J’ai tout de même relu l’explication de la boulimie. Les périodes de compulsions alimentaires propres à la boulimie m’ont touchées droit au cœur, mais les méthodes compensatoires qui s'en suivent, par exemple, ça, pas du tout. J’ai tapé, juste par curiosité, sans m’attendre à un résultat probant : « boulimie sans méthode compensatoire ». Et pouf! Hyperphagie boulimique est sorti, drette dans ma face. L’hyperphagie boulimique est caractérisée par des périodes de compulsions alimentaires sans méthodes compensatoires, d’où son nom qui englobe le mot boulimie. Et surtout, il n’y a pas de distorsion quant à la vision de soi et de son corps, ce qui encore une fois, me caractérise.

J’ai paniqué. J’ai écrit à une ancienne collègue nutritionniste, la suppliant de m’aider. Je ne savais pas quoi faire de toutes ces nouvelles informations. J’avais vraiment le sentiment d'être hyperphagique, que cette définition me correspondait. Elle m’a répondu, m’a suggéré de consulter, ce que je ferai. Mais elle m’a surtout conseillé un livreLundi, je me mets au régime!, par Geneviève Arbour et Judith Petitpats, qui a littéralement changé ma vie. Ce livre se présente comme étant « un guide pratique pour retrouver un poids naturel et se défaire de l’hyperphagie boulimique ». Au travers, entre autres, des témoignages touchants de gens ayant vécu de l’hyperphagie boulimique, on apprend à reconnaître ce qui cloche. Mais surtout, on se sent terriblement compris.e.

Jamais je ne m’étais sentie aussi comprise. Jamais. La nutrition avait toujours été pour moi un sujet tabou et particulièrement honteux. Personne ne semblait avoir le même problème. À un souper de filles, une amie parlait d’une collègue ainsi : « La fille là, la grosse baleine, est vraiment incompétente… Ben quoi, c’pas de ma faute si a mange trois hamburgers de suite! A s’aide pas là! » Et ça me fâchait incroyablement! Comment pouvait-elle ne pas comprendre qu’une relation avec la nourriture puisse être toxique et surtout, que ça puisse être difficile de s'en sortir?

Mais dans le livre, quand j’ai lu ceci : « Cette même intervenante m’a alors dit de faire preuve de compassion envers moi-même, que si j’en étais arrivée là justement, c’est parce que c’était la seule façon que je connaissais de fonctionner, et que je fonctionnais avec ce que j’avais, au mieux de mes connaissances. Je me souviens d’être rentrée chez moi en pleurant, car, pour la première fois de ma vie, une personne m’avait dit de ne pas me flageller et n’avait pas tenu le discours habituel de : tu n’as pas de volonté, il faut maigrir », j’ai pleuré. C’est vrai. Je n’ai pas à me flageller pour cette relation que j’ai avec la nourriture.

Et personne n’a à le faire.

Si vous sentez que vous avez peut-être une relation toxique avec la nourriture, n'hésitez pas à consulter un.e professionnel.le de la santé, que ce soit un.e nutritionniste ou un.e psychologue, ce qui vous convient le mieux. Voici d'ailleurs une liste de ressources qui pourraient vous venir en aide.

Vous méritez une relation saine avec la nourriture, vous méritez d’être compris.e, vous méritez d’aller mieux. 

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