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Le trou noir dans la tête : vivre avec la tentative de suicide d’un proche
Crédit: Leclubmay/Facebook

Tout s'est brisé. J'ai lu ton message d’au revoir. Il y a eu le tonnerre et les éclairs dans mon corps. 2 000 volts de panique, ça fesse. J'ai vraiment pensé que t'étais mort. Notre étoile éteinte pour toujours. Tu voulais appliquer du liquid paper sur toutes les traces de ton existence. Plus aucun moyen de communication.

Le plus gros choc de ma vie. J'ai pris une douche froide tout habillée, pis j'ai crié. J'ai appelé les gens que je savais capables de te retrouver. J'ai appelé une personne qui, je savais, m'aiderait à ne pas perdre la tête. Pis j'ai shut down. J'étais toute seule. Mon 4 ½ ne m'avait jamais semblé aussi grand. J'étais une chose, babaille l'humaine. Je vivais le pire des cauchemars. Mon corps a vomi, il s'est figé bien au creux de mon divan, dans une réalité où tu étais encore en vie.

Quatre heures ou une éternité. On t'a retrouvé. T'étais safe, à l'hôpital. Mon corps a sombré dans un profond sommeil d’anxiolytiques.

Tu dormais quand je t'ai revu pour la première fois. J'ai serré ton petit corps contre moi. Notre étoile brillait encore. Et puis, ça m'a frappée. Entre mes poumons, il y avait une grosse masse. Je ne pouvais plus respirer. Je n'avais pas réussi à empêcher ta tête de te faire du mal. Je n'avais pas su te protéger. Nos cheveux se sont entremêlés. J'ai appuyé ma tête contre ton ventre. J'ai juré que je ne te laisserai jamais partir. C'était à moi que tu avais lancé ton ultime SOS. C'était à moi de te sauver.
 


Les illustrations de Starchild Stela m'aident à me comprendre et à aller mieux.
Starchild Stela/Facebook

Les premiers jours, il y a eu du monde, beaucoup de monde. T'étais un peu en chriss que tout le monde le sache, mais je pense que ça te faisait du bien en même temps. Il y avait encore du monde pour t'aimer. J'écoutais ceux qui avaient trop peur, ceux qui pleuraient, ceux qui étaient en colère. J'aurais voulu qu'ils partent. J'aurais voulu t'avoir pour moi toute seule. Je ne disais rien. J'ai remis le nez dans mon quotidien.

Une semaine plus tard, t'es parti en voyage. J'étais fâchée contre le système. T'étais un danger pour toi-même pis ils te laissent partir loin. Là où je ne pourrai pas te guérir. Je devais réapprendre à te faire confiance. Tu essayais de reprendre les commandes de ta tête.

Quand ton avion a décollé, j'ai compris qu'il fallait que je prenne soin de moi. J'en ai parlé et parlé encore. Je voulais extérioriser les idées qui grugeaient ma tête. Souvent j'avais des vertiges. L'impression que le plancher glissait sous mes pieds, que ce que je vivais, ce n'était pas la réalité. Flashback de la soirée. Toutes les nuits, mon corps tente d'exorciser ce souvenir. Les cauchemars s'enfilent dans ma tête alors que la sueur perle sur mon corps. J'ai toutes sortes de réactions physiques et psychologiques.

Ça fait environ un mois et demi que t'as voulu partir. Je devrais faire comme toi et move on, mais je ne suis pas capable. J'y pense un peu moins par contre. J'apprends à dealer avec ce trou noir dans mon cerveau. Je peux être l'acolyte dans ta bataille contre ta tête, mais je ne peux pas te sauver. Tu dois te sauver toi, pis t'es bien parti. J'ai confiance en toi.

Maintenant, je dois me sauver moi.

Si jamais vous ou un de vos proches a besoin d'aide, n'hésitez pas, appelez. 

1 866 APPELLE

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