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​Le consentement : pas juste sous la couette
Crédit: Kai Pilger/Unsplash

On parle énormément de consentement depuis quelques mois, et c’est tout à fait souhaitable à mon sens. J’aurais tellement aimé qu’on m’en parle autant et aussi bien avant mon adolescence, mais ce n’était pas un concept très élaboré au-delà de la présentation du vidéo éducatif « C’est mon corps, ce n’est pas le tien » et la chanson quétaine qui l’accompagnait. (Que vous avez certainement dans la tête en ce moment, si vous la connaissez) Si j’avais été éduquée adéquatement sur le consentement, j’aurais vécu mon exploration sexuelle autrement. Toutefois, j’ai espoir que la génération actuelle sera mieux outillée sur la question, que petit à petit le mouvement actuel fera changer les choses un paradigme à la fois.

Récemment, j’ai commencé à me questionner sur ma propre éducation par rapport au consentement. Depuis mon enfance, je me souviens qu’on me demandait de donner absolument un bec avant de partir de chez la parenté, même si ça ne me tentait pas « pantoute ». C’était très correct pour mes parents d’exiger cette marque d’affection de ma part et personne ne remettait ça en question. Un enfant qui refusait de donner ou recevoir des becs était vu comme polisson, point final. Mes parents ne sont pas des tortionnaires, ils sont juste à l’image de la société à cette époque-là, et je comprends tout à fait leur geste. Je n’ai pas d’enfant, mais je pense que le fait de lever le voile sur le consentement me ferait questionner mes gestes si j’étais dans pareille situation. Je n’obligerais certainement pas mon enfant à donner ou recevoir des câlins s'il.elle ne veut pas. Je lui demanderais par contre de saluer de manière respectueuse, mais à distance, si c’est ce qu’il.elle préfère.

J’ai eu cette réflexion sur le consentement dans les diverses sphères sociales après un petit incident qui m’est arrivé récemment. J’étais dans un repas familial chez les parents de mon conjoint. Là-bas, on offre toujours énormément de nourriture aux hôtes. C’est culturel, mais c’est aussi l’expression d’affection à travers ce qu’on offre. C’est en même temps un vestige de la peur de manquer de quelque chose, dans des moments plus difficiles financièrement. Ma belle-maman n’a aucune mauvaise intention quand elle m’offre sans arrêt des biscuits, des chips, de la liqueur aux fraises, du pain, plus de viande, des patates, etc. Elle le fait parce qu’elle veut me recevoir « dignement ». Ça me rappelle mes grands-mères quand j’étais toute petite.

Le problème, c’est que je passe un peu pour la difficile, parce que je refuse tout ce qu’on m’offre. Ma belle-famille ne comprend pas pourquoi je n’ai pas faim pour un deuxième steak, une autre portion de riz ou que je n’aime pas les boissons gazeuses. Le fait de refuser tout ce que l’on m’offre les rend las et parfois, mon beau-père ou mon beau-frère lancent en riant « ben voyons, vas-tu accepter quelque chose? »

Il y a peu, on me l’a encore fait. Et là, j’ai eu eu un déclic. Tout ça vient de la notion de consentement que visiblement, il.elle.s ne connaissent pas bien. Le fait de dire non ne signifie pas que je les déteste, ou que je n’aime pas la cuisine de ma belle-mère, mais plutôt que j’ai atteint ma satiété. En fait, souvent on reprend mon assiette malgré mes protestations et on la remplit de nouveau. Au début, je me forçais à manger, en riant jaune, parce que je me sentais coupable de laisser de la nourriture. Mais maintenant, j’ai appris à m’affirmer et à ne pas vider mon assiette quand ils la remplissent à nouveau sans mon assentiment. Tout ça est un peu banal, me direz-vous, mais je trouve qu’il y a une belle analogie à faire avec le consentement.

Cependant, je ne pense pas que je vais faire un speech et causer un malaise familial lors de notre prochain repas chez mes beaux-parents… Toutefois, ça m’a donné l’idée d’aborder le sujet avec ma nièce de dix ans et son petit frère dans quelques années. Si je peux leur transmettre au moins cela, ce sera déjà un bon pas, vers une société plus respectueuse du « non » peu importe le contexte social. Si Maria ou Esteban se souviennent de leur matante canadienne « flyée » et ses explications bizarres dans quelques années, ce sera un pas dans la bonne direction.

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