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Wild ride de manège : ça fait 10 ans que je prends des antidépresseurs
Crédit: Audrey Malo/Facebook

15 ans. Il y a l’ombre de moi-même dans une salle de pédopsy. Je sais qu’il y a des étudiants qui m’observent de l’autre côté de la vitre. Salle d’interrogatoire vibe. C’était plus rapide de voir un psychiatre de cette façon.

J’explique à l’assistance pourquoi il y a des bobos sur mes bras et une peine infinie dans mon ventre. Ma bataille quotidienne contre les idées-coquerelles. Le spécialiste de ma tête, qui me connait depuis environ 30 minutes, nomme mes maux. Trouble panique avec agoraphobie, et dépression.  Pattes de mouches sur papier bleu. Prescription. Citalopram 50 mg.

Je dois passer un électrocardiogramme. Savoir si mon cœur peut supporter la médication. J’ai peur, mais je ne dis rien. Apparemment, mon cœur était capable d’en prendre. C’était donc parti pour ma première ride de manège d’antidépresseurs.

Assez rapidement, je me suis mise à aller mieux. Les blessures dans ma tête étaient encore bien présentes, mais les antidépresseurs les cachaient. Comme un bandaid qui recouvre un bobo encore rempli de pus. J’ai décidé que je n’avais pas besoin de la thérapie. Personne ne pouvait comprendre le labyrinthe de ma tête anyway.

Il y a eu le Cégep et le début de l’Université. J’allais bien. Je réussissais à être partout et à cacher que j’avais mal à l’intérieur de ma tête. Je baissais ma dose d’antidépresseurs de plus en plus. La vie me gueulait que prendre des pilules pour pas vouloir me tuer, c’était pas normal. Fallait être normale. Fitter dans le moule à petits humains-muffins beaux à l’extérieur comme à l’intérieur. Moi, fitter me faisait mal. Ça m’empêchait de respirer. Je sauvais les apparences. Je souriais les cicatrices sur mes jambes bien cachées sous mes leggings. J’ai voulu m’auto-médicamenter. Boire de l’alcool est beaucoup valorisé par la société que prendre des antidépresseurs. Très mauvaise idée.

Un jour, je n’ai plus réussi à être parfaite.

21 ans, j’ai sombré dans la tempête de ma tête. J’ai été hospitalisée. Citalopram 50mg à nouveau. Un mois. Deux mois. Aucun effet, on switch. Effexor 150 mg. Ma tête s’adapte mais pas mon corps. Effets secondaires pas mal plus primaires que d’autres choses. J’ai commencé une thérapie cognitivio-comportementale. Six ans après avoir avalé mon premier antidépresseur, j’ai compris qu’il me fallait plus pour guérir. Les antidépresseurs avaient beau être un bien beau bandaid, j’avais besoin d’un peu plus pour cicatriser.

24 ans, presque 25. Effexor 150 mg. 10 ans d’antidépresseurs. 10 ans pour arriver à accepter. Peut-être que j’aurai besoin de prendre des pilules toute ma vie. Peut-être que je ne peux fitter qu’avec les pilules. Elles m’ont fait prendre beaucoup de poids et elles ont un peu fucked up mon corps avec leurs effets secondaires. Par contre, elles m’aident à vivre autrement qu’avec une boule d’anxiété qui transperce ma gorge et mon ventre. Pis c’est bin correct.

J’avais envie de terminer ce petit  récit de vie avec une phrase psychopop de mon cru. J’en suis fière, vous aller sûrement capoter.

Pour moi, les antidépresseurs sont comme ma ceinture de sécurité dans le manège de la vie.


Moi lors de ma première année de prise d’antidépresseurs
Crédit : Nathalie Daigneault
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